La corruption est tellement répandue et acceptée au Cameroun qu’elle a été érigée en véritable institution. Elle est à la fois univers de pratiques et univers de sens.
Cependant, il est important de garder à l’esprit le fait que, ce qui caractérise l'acte corrompu ce n'est pas le transfert d'argent ni les conséquences néfastes qui peuvent en découler. Le fait de modifier l'exercice normal de sa fonction de telle sorte qu'il en résulte un avantage ou bénéfice personnel dénature cette fonction et constitue une corruption en toutes circonstances.
Par exemple le chef du personnel d'un cabinet ministériel qui choisit d'engager un candidat parce qu'il est son parent et non parce qu'il est le plus qualifié pour l'emploi, est corrompu car il trahit la confiance mise en lui par son chef hiérarchique. De même, le député qui, en votant pour ou contre une motion, tient plus compte des appuis financiers qui ont contribué à sa victoire électorale que de l’intérêt des électeurs qu'il représente est corrompu car il trahit la confiance mise en lui par ces électeurs. Ou encore un directeur d’une école de formation d’élites, qui choisit de ne faire recruter que les ressortissants de son village ou de sa région, est corrompu car il trahit la confiance mise en lui par tous les autres.
Dans ces trois cas, il y a eu corruption même si personne ne s'en rend compte et même si le prix et l'effet néfaste de cette corruption sont difficiles à identifier.
Ainsi, au-delà des transferts d'argent et des conséquences néfastes qui peuvent en découler, la corruption dénature les fonctions de l'appareil de l’état et l’empêche de remplir les rôles qui sont sa raison d’être, la réduction des inégalités, la constitution d’un capital social, le maintien de la sécurité et la création de conditions de prospérité pour tous les citoyens du pays. Au Cameroun, l’expansion de ce fléau peut s’analyser suivant un double système : le système de corruption par le haut et le système de corruption par le bas.
Le système de corruption par le haut
Il s’agit ici de la corruption perpétrée par la classe dirigeante ou des décideurs publics par l’institutionnalisation non seulement de la manipulation, de l'escroquerie, et de contrats truqués qui s'exercent au détriment de l’Etat et des citoyens mais aussi de la généralisation de règles et de comportements inconstitutionnels et illégaux sur le sol camerounais.
Leurs forfaits vont:
• Des détournements des fonds publics
• Distraction des impôts versés par les sociétés
• Mises aux enchères et rachat des biens publics
• Au conditionnement de l’entrée dans les grandes écoles par le versement du « gombo »...
Pour ces sinistres individus tout est permis, selon le principe de l'efficacité inversement proportionnelle à la légitimité: le droit n'a plus cours, seul compte le profit, qui justifie tout. Les conséquences socio-économiques de ce type de corruption peuvent être assimilées à celles du passage d’un « tsunami » dans un pays! Les sommes distraites des caisses de l’Etat sont tellement gigantesques que les populations arrivent à douter de leur véracité et en sont à se demander si le pays pourrait posséder autant de richesses vue l’état de misère dans lequel vit le peuple.
Ces actes de déprédation et d’incivisme causent un tord énorme au pays et hypothèque lourdement son avenir. La corruption est responsable d’une perte annuelle de recettes par l’Etat de 400 milliards FCFA. Le secteur forestier enregistre à lui seul une perte de près de 100 milliards FCFA par an pour exploitation illicite. Tandis qu’à peine 20% des impôts versés par les compagnies forestières aux communes est investi dans le développement local !
Le système de corruption par le bas
Une autre forme de corruption au Cameroun, moins connue mais pas moins nocive est celle de l’exécutant bureaucrate qui utilise sa position pour flatter son ego et s’enrichir plutôt que pour rendre les services pour lesquels il est payé. Par définition, le bureaucrate exécutant n'a pas de pouvoir de décision, sa tache est d'appliquer les règlements. Les pouvoirs de tels exécutants sont limités et il est souvent tentant pour eux d'utiliser leur position pour se valoriser et s’enrichir aux dépens des requérants qu'ils ont à servir.
Les moyens de marquer des points pour se faire payer sont multiples, attitude et comportement hostiles, voire même agressifs, délais abusifs, exigences superflues et, parfois refus brusques et inexpliqués de servir. Il ne s'agit pas ici de la petite coupure glissée avec les documents pour éviter des délais mais bien du bonbon psychologique et financier qu’exige le bureaucrate corrompu des requérants qui en ressortent souvent humiliés et tellement dégoûtés des contrôles bureaucratiques qu'ils sont poussés à agir sans tenir compte des lois et des règlements.
Les agents les plus concernés sont notamment, les inspecteurs des impôts, les agents des mairies, les douaniers, les policiers, les juges, les auxiliaires de justice (avocats, huissiers, notaires), les agents du trésor, des travaux publics, des transports, de l’industrie et du commerce, de l’éducation nationale, et ceux de l’administration territoriale. Ce genre de corruption développée par les fonctionnaires endommage aussi bien l’économie que les pires malversations.
Que peut-on dire de la structure et des postulats de ces deux systèmes ?
Que leur structure est celle d'un « système de contrôle », c’est-à-dire une structure de dominance au sein de laquelle les relations sont basées sur des rapports de force de type domination/soumission, persécuteur/victime, des rapports de conflits.
Ces systèmes de contrôle sont été mis en place et dirigés par des dominateurs-profiteurs. Toutefois, ces derniers n'ont généralement pas choisi en toute connaissance de cause d'être des dominateurs. Ils sont prisonniers de leurs réactions psychologiques dont ils n'ont pas conscience des mécanismes, et d'un système de pensée sur lequel reposent tous le système de contrôle, le système de pensée dualiste, dont ils ignorent pour la plupart la structure et les postulats.
En outre, la recherche du pouvoir et de l'argent, malsaine pour l'organisme, génératrice de stress, ruine leur santé et assujettit toute leur vie et celle de leur entourage. Prisonniers de l'image qu'ils ont d'eux-mêmes, des autres et du monde, les dominateurs sont « contrôlés par le besoin de contrôler ». Cette structure repose sur les postulats suivants:
• La croyance en la valeur de l'argent comme quelque chose de réel, doté d'une valeur absolue, et en des règles économiques dotées d'une existence en soi, indépendante de ses utilisateurs ;
• Le postulat selon lequel il n'est possible de s'enrichir qu'en dépouillant ou en tuant quelqu'un d'autre ;
• Une structure de relation basée sur l'exclusion, le tribalisme, le gain facile, la tricherie, la violence et le culte de l’apparence;
• Des relations de compétition agressives, de conflits mortels, entre inclus et exclus, les riches et les pauvres ;
• Une stratégie basée sur l'intelligence des rapports de force pour obtenir de l'argent.
Ces systèmes de corruption reposent sur la tromperie, le parasitisme, le pillage des ressources, la manipulation mentale, le tribalisme et sur le principe qui consiste à scier la branche sur laquelle on est assis: une fois que les ressources sont épuisées, qu'il n'y a plus rien à piller, le système s'effondre, ce qui sera bien évidemment préjudiciable à tout le peuple camerounais: le style de jeu où tout le monde est perdant au bout du compte, c’est-à-dire un jeu à somme négative !
Les conséquences pour le pays
Comme je l’ai déjà évoqué, la corruption est responsable au Cameroun d’une perte annuelle de près de 40% des recettes enregistrées par l’Etat. La plupart des études évoquent la perte de la rondelette somme de 400 milliards de francs CFA par an.
Présentée ainsi cette statistique n’est qu’un chiffre et ne permet pas de mettre en évidence les redoutables effets pervers de la pratique de la corruption au Cameroun. Il serait donc intéressant de se munir d’une loupe afin d’éclairer les lanternes sur les conséquences socio-économiques de cette pratique.
Sur le plan macroéconomique, la corruption est responsable du faible taux d’activité et du chômage endémique qui sévit au Cameroun. Illustrons cela par une simple « arithmétique politique ». Considérons les cas de deux entreprises, l’une au chiffre d’affaires de 50 millions employant 49 personnes et l’autre au chiffre d’affaires de 240 millions employant 149 personnes.
400 milliards de francs CFA ! C’est une somme qui permettrait de créer 8000 entreprises d’un chiffre d’affaires de 50 millions employant 392000 personnes ou 1700 entreprises d’un chiffre d’affaires de 240 millions employant 249000 personnes.
Au niveau microéconomique, la corruption crée et entretient la misère des populations. Les populations déjà sevrées de revenu sont obligées de verser des pots-de-vin à tout bout de champ pour bénéficier d’une prestation gratuite. Des études montrent qu’en moyenne, chaque famille camerounaise dépense en versement de pot-de-vin environ 100000 francs CFA par an pour faire avancer un dossier, toucher une pension. Ce qui est inadmissible compte tenu des revenus insignifiants des populations.
Cependant, il est important de garder à l’esprit le fait que, ce qui caractérise l'acte corrompu ce n'est pas le transfert d'argent ni les conséquences néfastes qui peuvent en découler. Le fait de modifier l'exercice normal de sa fonction de telle sorte qu'il en résulte un avantage ou bénéfice personnel dénature cette fonction et constitue une corruption en toutes circonstances.
Par exemple le chef du personnel d'un cabinet ministériel qui choisit d'engager un candidat parce qu'il est son parent et non parce qu'il est le plus qualifié pour l'emploi, est corrompu car il trahit la confiance mise en lui par son chef hiérarchique. De même, le député qui, en votant pour ou contre une motion, tient plus compte des appuis financiers qui ont contribué à sa victoire électorale que de l’intérêt des électeurs qu'il représente est corrompu car il trahit la confiance mise en lui par ces électeurs. Ou encore un directeur d’une école de formation d’élites, qui choisit de ne faire recruter que les ressortissants de son village ou de sa région, est corrompu car il trahit la confiance mise en lui par tous les autres.
Dans ces trois cas, il y a eu corruption même si personne ne s'en rend compte et même si le prix et l'effet néfaste de cette corruption sont difficiles à identifier.
Ainsi, au-delà des transferts d'argent et des conséquences néfastes qui peuvent en découler, la corruption dénature les fonctions de l'appareil de l’état et l’empêche de remplir les rôles qui sont sa raison d’être, la réduction des inégalités, la constitution d’un capital social, le maintien de la sécurité et la création de conditions de prospérité pour tous les citoyens du pays. Au Cameroun, l’expansion de ce fléau peut s’analyser suivant un double système : le système de corruption par le haut et le système de corruption par le bas.
Le système de corruption par le haut
Il s’agit ici de la corruption perpétrée par la classe dirigeante ou des décideurs publics par l’institutionnalisation non seulement de la manipulation, de l'escroquerie, et de contrats truqués qui s'exercent au détriment de l’Etat et des citoyens mais aussi de la généralisation de règles et de comportements inconstitutionnels et illégaux sur le sol camerounais.
Leurs forfaits vont:
• Des détournements des fonds publics
• Distraction des impôts versés par les sociétés
• Mises aux enchères et rachat des biens publics
• Au conditionnement de l’entrée dans les grandes écoles par le versement du « gombo »...
Pour ces sinistres individus tout est permis, selon le principe de l'efficacité inversement proportionnelle à la légitimité: le droit n'a plus cours, seul compte le profit, qui justifie tout. Les conséquences socio-économiques de ce type de corruption peuvent être assimilées à celles du passage d’un « tsunami » dans un pays! Les sommes distraites des caisses de l’Etat sont tellement gigantesques que les populations arrivent à douter de leur véracité et en sont à se demander si le pays pourrait posséder autant de richesses vue l’état de misère dans lequel vit le peuple.
Ces actes de déprédation et d’incivisme causent un tord énorme au pays et hypothèque lourdement son avenir. La corruption est responsable d’une perte annuelle de recettes par l’Etat de 400 milliards FCFA. Le secteur forestier enregistre à lui seul une perte de près de 100 milliards FCFA par an pour exploitation illicite. Tandis qu’à peine 20% des impôts versés par les compagnies forestières aux communes est investi dans le développement local !
Le système de corruption par le bas
Une autre forme de corruption au Cameroun, moins connue mais pas moins nocive est celle de l’exécutant bureaucrate qui utilise sa position pour flatter son ego et s’enrichir plutôt que pour rendre les services pour lesquels il est payé. Par définition, le bureaucrate exécutant n'a pas de pouvoir de décision, sa tache est d'appliquer les règlements. Les pouvoirs de tels exécutants sont limités et il est souvent tentant pour eux d'utiliser leur position pour se valoriser et s’enrichir aux dépens des requérants qu'ils ont à servir.
Les moyens de marquer des points pour se faire payer sont multiples, attitude et comportement hostiles, voire même agressifs, délais abusifs, exigences superflues et, parfois refus brusques et inexpliqués de servir. Il ne s'agit pas ici de la petite coupure glissée avec les documents pour éviter des délais mais bien du bonbon psychologique et financier qu’exige le bureaucrate corrompu des requérants qui en ressortent souvent humiliés et tellement dégoûtés des contrôles bureaucratiques qu'ils sont poussés à agir sans tenir compte des lois et des règlements.
Les agents les plus concernés sont notamment, les inspecteurs des impôts, les agents des mairies, les douaniers, les policiers, les juges, les auxiliaires de justice (avocats, huissiers, notaires), les agents du trésor, des travaux publics, des transports, de l’industrie et du commerce, de l’éducation nationale, et ceux de l’administration territoriale. Ce genre de corruption développée par les fonctionnaires endommage aussi bien l’économie que les pires malversations.
Que peut-on dire de la structure et des postulats de ces deux systèmes ?
Que leur structure est celle d'un « système de contrôle », c’est-à-dire une structure de dominance au sein de laquelle les relations sont basées sur des rapports de force de type domination/soumission, persécuteur/victime, des rapports de conflits.
Ces systèmes de contrôle sont été mis en place et dirigés par des dominateurs-profiteurs. Toutefois, ces derniers n'ont généralement pas choisi en toute connaissance de cause d'être des dominateurs. Ils sont prisonniers de leurs réactions psychologiques dont ils n'ont pas conscience des mécanismes, et d'un système de pensée sur lequel reposent tous le système de contrôle, le système de pensée dualiste, dont ils ignorent pour la plupart la structure et les postulats.
En outre, la recherche du pouvoir et de l'argent, malsaine pour l'organisme, génératrice de stress, ruine leur santé et assujettit toute leur vie et celle de leur entourage. Prisonniers de l'image qu'ils ont d'eux-mêmes, des autres et du monde, les dominateurs sont « contrôlés par le besoin de contrôler ». Cette structure repose sur les postulats suivants:
• La croyance en la valeur de l'argent comme quelque chose de réel, doté d'une valeur absolue, et en des règles économiques dotées d'une existence en soi, indépendante de ses utilisateurs ;
• Le postulat selon lequel il n'est possible de s'enrichir qu'en dépouillant ou en tuant quelqu'un d'autre ;
• Une structure de relation basée sur l'exclusion, le tribalisme, le gain facile, la tricherie, la violence et le culte de l’apparence;
• Des relations de compétition agressives, de conflits mortels, entre inclus et exclus, les riches et les pauvres ;
• Une stratégie basée sur l'intelligence des rapports de force pour obtenir de l'argent.
Ces systèmes de corruption reposent sur la tromperie, le parasitisme, le pillage des ressources, la manipulation mentale, le tribalisme et sur le principe qui consiste à scier la branche sur laquelle on est assis: une fois que les ressources sont épuisées, qu'il n'y a plus rien à piller, le système s'effondre, ce qui sera bien évidemment préjudiciable à tout le peuple camerounais: le style de jeu où tout le monde est perdant au bout du compte, c’est-à-dire un jeu à somme négative !
Les conséquences pour le pays
Comme je l’ai déjà évoqué, la corruption est responsable au Cameroun d’une perte annuelle de près de 40% des recettes enregistrées par l’Etat. La plupart des études évoquent la perte de la rondelette somme de 400 milliards de francs CFA par an.
Présentée ainsi cette statistique n’est qu’un chiffre et ne permet pas de mettre en évidence les redoutables effets pervers de la pratique de la corruption au Cameroun. Il serait donc intéressant de se munir d’une loupe afin d’éclairer les lanternes sur les conséquences socio-économiques de cette pratique.
Sur le plan macroéconomique, la corruption est responsable du faible taux d’activité et du chômage endémique qui sévit au Cameroun. Illustrons cela par une simple « arithmétique politique ». Considérons les cas de deux entreprises, l’une au chiffre d’affaires de 50 millions employant 49 personnes et l’autre au chiffre d’affaires de 240 millions employant 149 personnes.
400 milliards de francs CFA ! C’est une somme qui permettrait de créer 8000 entreprises d’un chiffre d’affaires de 50 millions employant 392000 personnes ou 1700 entreprises d’un chiffre d’affaires de 240 millions employant 249000 personnes.
Au niveau microéconomique, la corruption crée et entretient la misère des populations. Les populations déjà sevrées de revenu sont obligées de verser des pots-de-vin à tout bout de champ pour bénéficier d’une prestation gratuite. Des études montrent qu’en moyenne, chaque famille camerounaise dépense en versement de pot-de-vin environ 100000 francs CFA par an pour faire avancer un dossier, toucher une pension. Ce qui est inadmissible compte tenu des revenus insignifiants des populations.
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